dimanche 9 décembre 2012

Gabriel




On ne peut pas toujours parler du pape, fût-ce du pape hautain, de ses faux-culs, de ses faux seins. Il vient un jour de luxes inutiles où la prédiction prend fin. Ce jour polaire, aphteux, visqueux, vitreux, la pièce reste vide, inerte, inutile, infréquentable. Où sont les roulures d'antan, qui allaient à confesse en rangs benoîts, le rouge aux lèvres plutôt qu'au front, d'ailleurs au front on y va pour se faire descendre, des cendres qu'il faut ramener. Dans les églises on vit trop, ou pas assez, et je n'y mets jamais les pieds. Il y fait une lueur de cierge, un froid de canard, et des ténèbres d'antéchrist. Inutile de palpiter, nous palpitons en vain, pâles piteux passants d'ailleurs, de loin, de fort loin, qui feignons de connaître et de nous intéresser : j'ai toujours suspecté le bedeau de piquer dans la caisse. J'allai dans la ville et je vis le peuple des parcmètres alignés, en rangs dociles – comme roulures à confesse -, converser au peuple des voitures, étrons éléphantesques dévotement posés au pied de leur borgnitude.
                                  Pauvre Gabriel ! Il ignorait ce qui l'attendait, et cela valait mieux, car rien ne l'attendait. Ni personne. Tous, lassés, étaient partis. La messe avait été dite, le vin bu, la cause entendue et la lumière faite. Le curé avait tiré en longueur (la longue file des roulures, toujours, …), et la péroraison envoyée, chacun s'était tiré en douce (des couples s'étaient formés : une roulure, un invité). Gabriel, lui, ne connaissait pas le défunt –il évitait scrupuleusement de se rendre aux enterrements des défunts qu'il avait connus avant leur défunction -, et s'était endormi, dans un air de profonde prière. Un crachin de deuil s'était mis à tomber, confirmation que Dieu lui non plus n'avait pas aimé le spectacle. Le curé, dubitatif, (on ignorait son prénom) avait hoché la tête comme un encensoir, devant tant de piété tapageuse puis il avait regagné le petit F2 lugubre que l'évêché mettait fraternellement à sa disposition. La nuit se referma  bientôt sur Gabriel. On entendait des ululements de chouette et des pépiements de canaris. C'était l'heure où les riverains vont boire, les estaminets se remplissaient d'une faune équivoque et qui vaque. On s'arsouillait facile au son rassurant des catastrophes planétaires que débitait la bouille débonnaire du préposé à l'étrange lucarne. La vie se débinait l'air de rien avec sa régularité de goutte à goutte, ça sentait un peu la mort mais l'épaisseur des fumées de tabac couvrait le remugle.
      Un floc froid dans le cou réveilla Gabriel. Son œil brumeux tournoya un moment entre les croix alignées comme des parcmètres avant qu'il ne se souvînt où il était qui et quand il était venu comment. Les lâcheurs ! Pas de vrais amis. La terre est peuplée de faux–culs – ce qui lui rappela vaguement une histoire de faux–cils et de faux– seins -, mais nom d'une burette, il leur revaudrait ça.  

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