dimanche 27 janvier 2013

la malédiction



Il faut de nouveau la chasser de mon esprit. Elle y est revenue comme un démon chinois, toute colère, tout mépris, demande muette, besoin informulé qui te rend coupable de ne pas l’entendre. Elle impose ses lois, sa façon de jouer. Tu te demandes : comment aurait-elle voulu que je me comporte, ta volonté est abolie, tu as oublié qui tu es. Immobile elle assiste à la pantomime que tu exécutes malgré toi autour d’elle, tu tournes en toupie autour de son vide.
            Elle te possède et tu n’es rien : tu n’es rien qu’elle veuille posséder. Tu ouvres ta main, elle est vide, il n’y a que de l’absence entre vous, et du silence dans vos paroles.
            Tu es allé fouiller sa tombe et tu en as évoqué le spectre blafard, qui maintenant te fixe de ses yeux morts. La nuit lui est propice ; si tu survis à la terreur peut-être le retour du jour demain dissipera ses cendres.


            Tu risques de croire que la femme est malédiction. Qu’elle ne peut être que ça ou ça. Que ce corps blanc de désir, offert à ton attente, exposé, tentateur. Dérobé. Ou ce regard de cendre, cette imprécation muette dont le cri déchire tes oreilles pour l’éternité. Noli me tangere. Tu entends les chacals au-dehors reprendre son cri de louve. Elle brandit le glaive de la vengeance, tu ne trouveras nul village où te réfugier, partout tu perçois la clameur meurtrière de la foule qu’elle dresse contre toi. Nul repos, nul bonheur, sa haine froide et désolée te débusquera dans ta moindre tanière.


            J’ai remonté, une ultime fois, ces escaliers de la mort, la peur au ventre. J’avais ces livres à lui rendre. J’avais mon livre noir à reprendre, toute la sagesse heureuse du Tao Te King, resté entre ses mains comme une parcelle de ma chair, par quoi elle gardait pouvoir sur mon âme. Je ne pouvais pas lui laisser ce livre, ou alors il eût fallu trouver un moyen de le brûler. C’est un livre au cuir épais noir, aux pages de vélin ornées de bambous légers, la tranche en est dorée à l’or fin. Mais il n’est pas sûr qu’il soit demeuré exempt de sa sorcellerie. Nous avions, avec amabilité, convenu du rendez-vous. Je n’avais pas de raison d’avoir peur, et j’avais peur.

Tajines et couscous




Un excellent resto marocain dans le Quartier Latin : Cuisine savoureuse, fine, cadre raffiné ; et l'accueil est sympathique. Un très agréable endroit !