Ce sont des petits paysans. Arrachés à leur glèbe, à leurs
croyances, à leurs certitudes hébétées que la seule réalité est la matière, que
les seules jouissances sont du ventre, ou du bas-ventre, que leur servitude est
naturelle, inéluctable, que la seule ambition est de servir le maître, et de
lui lécher la main quand elle dispensera la récompense.
Qui nous en veulent de vouloir les désaliéner, eux qui ne
sont heureux, en sécurité, que dans la fange de leurs croyances, certitudes que
le monde est à leur image, à leur service, à leur botte.
Qui ne sont là, pas tous, la plupart, que pour accomplir
leur idéal : avoir de la thune pour s’acheter le plus récent Galaxy Super
Géant et la télé écran plat 12000 K et la bagnole et la panoplie de l’Esclave
de 1e classe, celui qui a du Pouvoir d’achat en échange de sa soumission
totale. Et qui nous méprisent, et que nous agaçons, c’est qui ces deux cons qui
pérorent tout devant la salle, qui nous bassinent d’obscurités inutiles à nos désirs de possession ?
Qu’on nous a enjoint de venir évangéliser, leur prêcher la
bonne parole des nobles ambitions de l’esprit, à laquelle nul ne croit, surtout
pas ses commanditaires qui savent qu’un « diplôme », ça se monnaye,
ça sert à se vendre plus cher, à accéder au sérail, eunuque de luxe à chaîne
dorée.
Qui sortent de notre salle, de notre périmètre de
contamination, comme on tire la chasse.
Ce sont des brutes, à peine levées de la matière, à l’intelligence
seulement ébauchée, brouillard vacillant, ruse pour trouver sa proie, instinct
pour craindre le danger : mais, non, vraiment, ils ne voient pas, cette
créature verticale, devant eux, qui use du langage pour autre chose que les
consignes de chasse, ni prédateur ni proie, ils ne voient pas ce qu’ils
pourraient en faire. Jouer avec, s’y faire les dents, s’entraîner au coup de
griffe, peut-être, et puis la laisser, dans son inutilité indifférente.
Pas tous. Peut-être, parfois, rarement, un, en commencement
d’évolution, qui a commencé son processus d’hominisation, dont nos mots
percutent l’intelligence, étincelle, qui pressent qu’il peut y avoir autre
chose, qu’à s’égarer loin du troupeau on peut trouver des chemins de hasard.
Peu importe ce qu’il y a au fond de la classe, toute la
classe n’est qu’un épais fond. Bêtes récalcitrantes, futurs esclaves déjà
serviles : rien. Qu’un moment, exceptionnellement, de fugitif plaisir. L’illusion
d’avoir fait quelque chose.
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