samedi 19 mai 2012

Ecologie et catastrophisme millénariste


« Pour WWF, en 2030, nous aurons besoin de deux planètes pour survivre"
« Pour assurer leurs besoins, les pays développés puisent chez leurs voisins du Sud, au détriment de la biodiversité, souligne le dernier rapport de (...) »

          Pas si simple, voire simpliste ... Il y a quelque chose des vieux fantasmes millénaristes, apocalyptiques, dans ces annonces spectaculaires, avec leur arrière-plan moralisateur ("malheur aux impies qui se consument dans les plaisirs !" On lit ça depuis la Bible ! (le fantasme de "Babylone", la pécheresse, condamnée à la destruction).
Ce genre d'avertissement (si tu n'es pas gentil, le croquemitaine viendra te prendre !) méconnaît au moins deux notions, et c'est ce qui rend si souvent l'écologisme si niais et peu crédible : d'une part, l'histoire montre que les sauts qualitatifs ont été le résultat de la confrontation à des obstacles majeurs : découverte de nouvelles énergies, de nouvelles terres (non, notre planète n'a rien d'unique !), de nouvelles organisations. Projeter dans le futur les modes de vie actuels a peu de sens. C'est la nécessité qui pousse l'homme à inventer de nouvelles solutions.
D'autre part, notre espèce n'est pas (et n'a jamais été) un gentil club d'humanistes compatissants. On s'est toujours piqué, entre nations, entre classes, entre voisins, ce que l'autre avait de mieux, de plus. Pas nouveau d'annexer les terres voisines : on peut le déplorer (mais l'angélisme est toujours suspect : "qui veut faire l'ange fait la bête", nous prévient Pascal ; qui veut méconnaître ses pulsions prédatrices les recouvre d'un manteau pudique et hypocrite), mais dans ce cas il faut chercher ce qu'il y a à changer, et non faire comme si nous étions de fait déjà solidaires. Pour le dire autrement, les solutions passent par le domaine politique, philosophique (en termes de rapports de force, de concurrence non seulement pour la survie mais aussi - surtout ? - pour le plaisir.) ça n'enlève rien à la validité de certaines mesures écologiques, à leur intérêt ; mais des solutions de pure gestion des problèmes sur le plan écologique aboutissent paradoxalement à des effets liberticides, au risque de ce qu'on a appelé 'l'intégrisme vert". Il y a à interdire aux autres leurs plaisirs "polluants" la même jouissance trouble que celle des pères la pudeur chrétiens, en des termes étrangement similaires ; la même fierté de supériorité morale ; et le même déni que la vie, surtout humaine, est intrinsèquement polluante et prédatrice ( "je vis donc je pète" pourrait être une belle devise). Ce qui n'interdit pas de réfléchir aux conséquences néfastes de nos plaisirs ; puis de négocier. Mais sans se cacher que c'est une négociation : mon plaisir (de fumer, de voyager, de bouffer, etc) sera toujours le déplaisir de quelqu'un, tout aussi estimable que moi, mais pas plus. Conduire un 4*4 ou bouffer de gros beefsteaks est peut-être finalement beaucoup moins "grave" (?), "condamnable" (?) que d'autres comportements plus écologiquement corrects ... Je redoute toutes les ligues de vertu. Que derrière tout ordre moral, quel qu'il soit, il y ait surtout l'Ordre.

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